Ville de Refuge


Cette rubrique concerne le ministère du pasteur, et plus spécifiquement de celui qui a la charge des âmes dans une Église locale. Dans certains milieux, on l'appelle, le "berger", le responsable de l'assemblée. Dans d'autres milieux, on l'appelle "l'ancien".

Régulièrement, des réflexions nouvelles seront ajoutées ici.


 

Il n'est pas bon que le pasteur soit seul...

Une première remarque : "Il n'est pas bon que l'homme soit seul". On pourrait l'appliquer à certaines de nos assemblées actuelles, dirigées par un seul homme. Certes, il peut arriver que l'on soit seul pour diriger, au début d'une oeuvre, au moment de la fondation d'une Église, tout simplement parce que c'est la réalité et qu'il n'y a personne d'autre. Mais, dans le temps, il est bon que le pasteur puisse assez rapidement prendre comme objectif de former des hommes et des femmes capables de l'entourer, puis de partager la responsabilité du troupeau avec lui. Ainsi les fidèles de l'Église verront une équipe dont les membres sont unis, se relayer dans les responsabilités de l'Église. L'un prêche tel dimanche, puis l'autre la fois suivante. Les dons, les caractères, les personnalités sont différents et s'enrichissent mutuellement tout en enrichissant l'ensemble du troupeau qui ne voit plus désormais uniquement un seul homme mais une équipe. C'est bien là la vision néo-testamentaire pour l'assemblée locale. Mais c'est aussi la vision actuelle de Dieu pour les Églises, car Il veut lever une génération d'hommes et de femmes de Dieu "sans visage".

Soyons attentifs à cela. Qu'un homme ne s'entête pas à vouloir diriger SEUL une assemblée ou une oeuvre, lorsqu'il a la possibilité de former d'autres hommes avec lui. Jésus a consacré la majeure partie de son ministère à former les disciples, puis Il est remonté au Ciel à la droite de Son Père. Il n'a ouvert aucune Église, mais a d'abord formé des hommes. Le St-Esprit et les disciples formés se sont occupés de la suite. De nos jours, le St-Esprit voudrait oeuvrer encore dans ce sens... si nous le voulons bien. Ne nous étonnons pas si des problèmes surgissent parfois dans une assemblée, alors que la mise en place d'une équipe ne s'est pas réellement faite à temps. C'est peut-être que le Seigneur voudrait attirer l'attention sur ce point.

 

Entouré d'une équipe, une vraie !

  Dans certaines assemblées, le pasteur s'entoure d'une équipe. Mais finalement, d'une manière adroite et parfois manipulatrice, c'est toujours lui qui prend ad vitam eternam toutes les décisions, qui gère complètement l'Église, tout en questionnant de temps en temps les membres de "son" équipe pour savoir s'ils le suivent. Il distribue aussi les tâches comme un professeur avec ses élèves. Ou comme un patron d'entreprise qui dirige ses employés. Ce n'est pas cela vivre en équipe ! Le pasteur, qui est le garant et le protecteur de la vision pour l'Église locale, devrait tenter de faire mûrir ses co-équipiers, de telle manière qu'ils soient rendus capables de prendre eux-mêmes collégialement les décisions, et que lui aussi donne son avis.

Dans d'autres assemblées, le pasteur s'est entouré exclusivement de frères et sœurs qui lui ressemblent et pensent comme lui (les autres étant en quelque sorte "des gens peu spirituels"). Ils ont tous les mêmes attitudes que le pasteur, ils copient sa personnalité, ils parlent comme lui... nous avons encore là affaire à des "copies conformes" ou "CC", des "photocopies" du pasteur, des "clones" (pardonnez-moi de vous choquer). Ce n'est toujours pas cela une vraie équipe ! Le pasteur devrait pouvoir faire lever avec respect un ensemble de personnes qui garderont leur vraie personnalité, qui trouveront leur propre épanouissement en devenant eux-mêmes, et en le devenant à l'image de Christ. Ces personnes ne devront pas ressembler au pasteur mais au Seigneur, avec leur entendement et leur perception propre, leur discernement propre. Une équipe où tout le monde est toujours du même avis et a toujours les mêmes attitudes  n'est pas une vraie équipe !

 

Le cléricalisme

La tendance au cléricalisme et au comportement religieux fait que le pasteur peut se laisser adorer et élever par son entourage. Lorsque quelqu'un, à la fin d'un culte, vient le trouver pour lui dire que le message était bien, il devrait avoir l'habitude de répondre : "C'est merveilleux ! je suis content que vous ayez reçu du Seigneur durant cette réunion, que Son Nom seul soit glorifié ! et merci pour vos encouragements." Le fait qu'un ministère se laisse élever est lié à l'immaturité spirituelle de celui qui a reçu ce ministère, et aux personnes de son entourage qui en font une idole ; il gère "son" ministère, alors qu'il devrait aider à gérer "le ministère de Dieu en Lui", celui que Dieu a bien voulu lui prêter pendant un temps. Le fait pour un ministère de se croire indispensable à tout ce qui se passe dans l'assemblée est aussi un piège et dénote d'un dysfonctionnement interne à l'Église. Dans les Églises, on entend souvent : "Va demander au pasteur" "Le pasteur dit que...." "L'avis du pasteur est que..." "Obéis au pasteur": ce raisonnement unique chez les membres de l'assemblée démontre que ce dernier se laisse élever voire même adorer dans le temps. 

Un pasteur doit montrer qu'il n'a pas toujours raison, et rechercher l'humilité lorsqu'il affirme un principe. Il n'y a pas que lui qui reçoit des petites lumières de Dieu ! Il doit se laisser remettre en question, comme à l'intérieur d'une grande famille. Il doit pouvoir laisser transparaître aussi bien ses défauts que ses qualités, car si adroitement il cache toujours ses défauts, le peuple de Dieu dont il a la charge momentanée va se décourager en pensant qu'il lui sera impossible d'atteindre le degré de sanctification de son pasteur ! C'est ainsi que certes, quelques fonceurs se lèveront et relèveront le défi pour "obéir" au pasteur, mais la majorité des brebis seront découragées et baisseront les bras à la longue. Certains retomberont dans le péché à cause de cela.

 

L'abus de pouvoir

Nous abordons là un sujet sensible, où des divergences pourront surgir à la lecture de ce qui suit. Un pasteur, un ancien ne devrait pas cultiver le culte du pouvoir. Il devrait pouvoir déléguer ses tâches le plus possible, au fur et à mesure que des hommes et des femmes se lèvent et progressent dans l'onction et dans la responsabilité spirituelle de l'assemblée locale. Déléguer veut dire déléguer. Dans certaines Églises, l'autorité est certes déléguée, mais le pouvoir du pasteur reste implacable et plane d'une manière omniprésente au dessus de ses collaborateurs, lesquels ne se sentent jamais libres, et se soumettent à la pensée universelle du pasteur, car ils savent que "soit ça passe, soit ça casse". Dans certains cas on peut parler d'abus spirituel, car il y a une telle emprise sur les âmes qui ne vient pas de Dieu ! En effet, Dieu laisse libre Son peuple de faire des erreurs, et s'il se repent Il répare les catastrophes, et bénit dans un esprit de miséricorde. Dieu n'a pas d'emprise excessive sur nous, n'en ayons pas sur les autres.

 

Le droit à l'erreur

 Il est important qu'un pasteur ou un ancien donne le droit à l'erreur à ses autres collaborateurs : c'est souvent par l'erreur que l'on apprend le plus. L'esprit de pouvoir peut être entretenu volontairement ou involontairement par le pasteur : si ce dernier prend toujours le micro à tout instant de la réunion alors qu'il a délégué son pouvoir à un autre frère pour gérer et présider la réunion, il y a quelque chose qui ne va pas : le manque de confiance ? la peur que le frère soit "meilleur" que lui dans la conduite de la réunion ? ou le désir de montrer qu'il est toujours aux commandes, pour se sécuriser lui-même ? 

Savoir déléguer

Déléguer, c'est libérer l'onction qui est sur nous, pour que l'autre la reçoive et la gère lui-même comme il pense que cela est juste. Lorsque nous déléguons, nous devrions aussi libérer l'autre dans ses potentialités, même s'il est maladroit au début et fait des erreurs. C'est comme cela que nous ferons grandir les autres, en les laissant faire, et non en les étouffant par un esprit constant de contrôle et de manipulation. Pas étonnant qu'un pasteur qui ne sait pas déléguer, se plaigne ensuite de ne pas avoir réellement de collaborateur solide autour le lui. En effet, avec le temps, ses futurs collaborateurs prennent leurs jambes à leur cou et rompent la communion tellement ils souffrent d'être pris éternellement pour des petits enfants spirituels ! Ou alors ils rentrent dans les rangs en reproduisant à la lettre les directives de leur "chef", et ils deviennent des photocopies vivantes du pasteur.

Savoir libérer

L'abus de pouvoir concerne également la prise de position publique des pasteurs pendant leurs prédications : "Vous ne devriez jamais regarder la télévision, c'est un instrument satanique ! N'ayez pas Internet, n'allez jamais dans un bar, n'écoutez jamais telle ou telle musique, ne fréquentez jamais les païens ou les chrétiens rétrogrades, venez scrupuleusement à chaque réunion de la semaine etc.. Dans certains cas cet enrôlement légaliste et forcé est accompagné de pressions intolérables : "vous allez perdre votre salut, votre paix, la bénédiction qui est sur vous se tournera en malédiction, vous allez tomber"... Nous avons affaire à une sorte de gourou involontaire qui pointe la présence des membres de son Église à chaque réunion, jette l'anathème sur les absents... en oubliant "que c'est pour la liberté que Christ vous a affranchi". Un pasteur qui pratique l'abus de pouvoir viole les consciences et les âmes, et imprime autre chose que l'amour de Dieu et la liberté des enfants de Dieu dans l'âme de ses brebis. Il les rend dépendant non de Dieu, mais de lui. Il aura besoin non qu'on le rejette à son tour, mais qu'on lui explique que son comportement à ce sujet est faux, et qu'il doit rentrer dans la repentance.

La vraie Église locale

La vraie Église locale est d'abord à la maison, en semaine, puis deuxièmement, entre les murs du bâtiment de l'Église lors des réunions publiques. La vraie Église est spirituelle, elle n'habite pas d'abord dans un bâtiment mais dans des cœurs. Attention à mettre les éléments dans le bon ordre. Je ne serai pas d'abord béni parce que je vais à toutes les réunions de la semaine de mon Église, mais parce que je reste constamment en relation avec Dieu dans toutes mes journées, au travail et à la maison, et que je l'écoute et Le suis. Nous sommes un édifice spirituel, mais pas d'abord un bâtiment ! Le vrai pasteur, c'est le Pasteur des pasteurs, c'est Jésus-Christ ! mais pas d'abord un homme...  Attirons les âmes de nos paroissiens vers Lui et non vers nous ou nos pensées !

                                                                    Pasteur Philippe Auzenet


                      

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